Musique

Découvrez le son reggae dub tounsi signé Haydar Hamdi

©Yassine Meddeb Hamrouni

Originaire du sud tunisien, Hayder Hamdi a grandi dans la ville de Gafsa. Cette région connue pour ses rimes, ses chants et ses textes poignants bercera Hayder et lui inculquera toutes les valeurs et les idéologies profondes qui forgeront son tempérament.

Par ailleurs, Hayder Hamdi n'est autre que le fils d'un comédien et écrivain (le nommer).  Ainsi, il baignera dès son jeune âge au milieu d'acteurs, de chanteurs, de peintres, de poètes, de réalisateurs qui ne feront qu'accentuer son goût pour la musique et l'écriture des textes.

C'est donc à travers la musique que Hayder Hamdi décide de transmettre des messages forts, c'est sa façon à lui de s'exprimer et de libérer ses pensées.

Ses textes viennent se poser sur une musique entraînante aux sonorités atypiques, du dub "tounsi" délicieux à écouter à n'importe quel moment de la journée. 

On vous laisse tout découvrir sur son parcours et ses projets à venir grâce à cette interview.


Comment le groupe Haydar Hamdi s'est-t-il créé ? Racontez-nous votre union.


On est cinq à jouer, Tarek Maâroufi à la Batterie Slim Abida à la basse, Nidhal Jaoua au kanun, Narjess Saâd aux percussions et moi-même au chant et guitare. On fait partie d'une famille artistique. 
 Avant de jouer en France sous le nom de Haydar Hamdi, on jouait en Tunisie sous le nom de Barba Roots, un projet créé en 2008 sous la Tente Estivale de Hamam Ghzez, un son reggae gnawa protestataire. 

On a beaucoup joué dans les réseaux alternatifs  jusqu'en 2011. On a participé à la révolution en Tunisie,  une agréable expérience mais décevante à la fin.  En 2012, je suis parti en France pour faire partie d'un projet artistique appelé Mix Ta Race et j'ai fini par rester ici où j'ai retrouvé plus tard quelques membres de Bar Baroots. On a rejoué avec mes nouveaux musiciens mais sous le nom de Haydar Hamdi cette fois. 

Nouvelles compositions, nouveau son, nouvelle approche mais toujours  le même esprit revendicateur et intègre. On a sorti un premier Ep « 404 » sous Le label parisien Shouka, en 2013. Depuis, notre son a mûri et en mai 2015 nous avons sorti notre premier album, Fikra, chez le Label Studio 7c avec Julien Cordier. On a enchaîné une belle tournée avec cet album : Espagne, Maroc, Pays-Bas, Belgique, France et Tunisie bien sûr et nous y  voilà.

Sous des rythmes entraînants, les chansons de votre dernier album "Fikra" sont pourtant composées de paroles engagées abordant des sujets sociopolitiques. Que défendez-vous dans vos textes et pourquoi le faites-vous ? 

J'essaye de chanter mon vécu en tant que jeune Tunisien, ça donne des textes engagés ? Je préfère dire intègres. La musique est notre façon de nous exprimer. J'ai la chance de partager une même vision artistique avec mes musiciens et cela donne un son atypique: un métissage de reggae dub et d'oriental   avec des textes poignants. On trouve que c'est bien de vous faire danser en racontant une réalité pas si joyeuse .


©Yassine Meddeb Hamrouni

Pourquoi avez-vous décidé de quitter la Tunisie pour la France ? Y avez-vous trouvé ce qui manquait dans votre pays natal à votre épanouissement professionnel ?


On a jamais décidé de quitter la Tunisie,  on a juste plus de performances à l'étranger qu’en Tunisie ; du coup on est  installés à Paris parce que ça nous facilite le travail. Il faut dire qu'en France on respecte plus les droits des artistes. Il y a  aussi un meilleur encadrement pour les jeunes, il y a plus de diversité artistique. Cela nous a permis d'avancer dans notre carrière et d'apprendre plus des différentes expériences  qui sont plus accessibles ici qu’en Tunisie.  Si vous voulez, c'est le voyage qui nous a permis de nous épanouir professionnellement et on essaye toujours de partager ces différents acquis avec la scène tunisienne.

Quelles sont les opportunités qui se sont offertes à vous ?


Pour arriver jusque là on était bien entourés avec notre label, le Studio 7C ainsi qu'avec notre manageuse Stéphanie De Freitas. Ils nous ont permis de jouer à un autre niveau et de rencontrer plus de gens plus expérimentés que nous. Par exemple,  on a joué avec Trio, avec Felix Sabbal locco, avec  La rue Kétanou, on a  aussi fait le Casino De Paris avec les Zoufris Maracas. On a fait notre parcours de la petite scène parisienne à la plus grande et finalement on a appris que  le travail paye mais que le talent fascine. C'est plutôt grâce aux gens qu'on a rencontrés et avec qui on a travaillé que l'on a vraiment gagné en maturité et en expérience.  Maintenant, le meilleur reste à venir.

Quel bilan pouvez-vous dresser de votre parcours jusqu'ici ? Comptez-vous venir plus souvent en Tunisie et faire découvrir votre musique au public tunisien ?


Je n'ai pas à me plaindre. Avec mes musiciens on a réussi à créer notre identité sonore et on en est fiers. On chante pour nous et ça plaît aux autres - les gens s'identifient même à nous. Pas de mensonges, pas de mascarade juste l'art pour l'art et on arrive à s’épanouir en restant intègre et le reste vient tout seul… que demander de plus. Je dirais que c'est un bilan positif et on veut que cela continue longtemps dans ce sens,  voire meilleur si possible, mais rien ne presse. Pareil pour jouer en Tunisie, on essaye de renter quand on peut, même si cela est parfois assez compliqué. Si on parle de festivals c'est dur car il n'y a pas de vértiables structures d'encadrement pour les artistes. L'administration et la gérance des affaires culturelles en Tunisie sont archaïques et peu efficaces.  Nous, on reste fidèles à la scène alternative tunisienne, on arrive ainsi à organiser nos propres concerts et on joue à chaque fois, certes dans un cadre plutôt restreint mais on joue quand même. On espère réussir à toucher plus de monde bientôt.

Quels sont vos projets à venir ?


Que du bonheur ! On finit quelques dates sympas en France et en novembre on passe en studio pour l'enregistrement de notre prochain album. Il y aura 10 chansons, et une nouvelle approche plutôt électronique dans notre son avec l'ajout des machines. L'album sera disponible comme pour Fikra et 404 avant lui, en vente sur vos tablettes et mobiles ainsi que sur CD d'ici février. La tournée est prévue  pour  mars et on passera sûrement par la Tunisie.


Meriem AIDOUN

Paru le 15 septembre 2016