Théâtre/danse/littérature

Diva motherfucker ou… l’égoïste romantique !

Diva motherfucker…voilà un intitulé qui fait du bien au moral mais surtout à la littérature ! Jihène Charrad vient en effet de mettre un coup de poing dans la gueule de tous ceux qui disaient que « la littérature, c’est sérieux, inaccessible » on a bien compris le genre : barbant.


Or, grâce à un ouvrage qui mélange avec justesse ton décalé et réflexions subtiles, cette auteure qui s’approche à grand pas du cap de la trentaine et qui nous fait part de ses angoisses, a démontré le contraire. Diva est un livre optimiste, frais, léger, une sorte de « chroniques » d’une jeune femme (dé)rangée, clin d’œil assez malin à Mr Beigbeder ? Notre Frédéric addict’ serait charmée de constater que la Diva est une sorte de Marc Marronnier qui enchaîne les claques pour mieux se retrouver : tiraillée entre un Divo égocentrique et paradoxalement en proie au doute, une sorte de Diva masculin, des idéaux, des amis, les conventions et les normes…bref, tiraillée entre plusieurs choses, les envies, les besoins et le fameux « tu dois être/faire ceci ou cela », la Diva semble parfois ramer pour trancher…ces questionnements induisent inévitablement à la réflexion. Et c’est là que ce livre semble dévoiler toute sa complexité. Complexité ? En fait, Jihène entre plutôt en connivence avec ses lecteurs en les guidant, en leur montrant qu’il est grand temps de réfléchir, elle les entraîne à pas chassés dans un univers féminin certes mais un univers rythmé par la réflexion et les éternelles questions existentielles. La dimension philosophique va ainsi de pair avec l’humour, le non-sérieux côtoie l’intellect à coups de Lévi-Strauss, de Voltaire et de Céline. Ce livre lumineux et pétillant devient ainsi la bible des éclairés, une bible pour éclairer des esprits en quête de réponses. Toutefois, si notre Juliette des temps modernes, libre et libérée et de surcroît réaliste car consciente qu’elle vit dans une société corsetée, se cherche et semble trouver, une maturité qu’elle acquiert en filigrane, tout en finesse, comme une ballerine s’entraînerait pour devenir une danseuse étoile, la Diva et en creux Jihène nous montre que le bonheur n’est pas un concept philosophique inaccessible, faisant partie du domaine des « hautes sphères » autrement dit, un idéal réservé à une caste, bien au contraire : le bonheur se limiterait presque à une meilleure amie atypique, enjouée mais surtout loyale et à un bonhomme imparfaitement parfait !

Accepter qui on est, être conscient de ce qu’on est, et envoyer les autres valser, telle est la moralité de ce livre hybride, à mi-chemin entre un conte de Perrault revisité, un Cendrillon des temps modernes et un Sartre, les oripeaux et l’inaccessibilité intellectuelle en moins, sans oublier la Comédie humaine balzacienne mais en un seul ouvrage, cette fois ! La force de ce livre réside aussi dans ce background culturel, une ouverture sur l’occident et un enracinement dans les vieux adages tunisiens, les petits trucs de nos grands-mères, une sorte d’épices « idiomatiques » qui font l’originalité de ce livre. Un livre complet, identitaire et authentique, à l’effigie de son auteure, une Jihène qui tangue entre deux rives mais qui a réussi le pari de rester elle-même.

Bref, Diva est une sorte de gymnastique intellectuelle, de barres parallèles pour nos neurones, de prozac naturel pour notre mental ! Fou rire garanti entre copine et pourquoi pas, retrouvailles mielleuses et torrides avec son petit-ami, aussi « imparfait » soit-il !

Editions: POP LIBRIS, prix de vente 12 Dt.


Fatma Souiri Gharbi