Théâtre/danse/littérature

Énigme littéraire : mais qui a pu, aujourd’hui, détrôné Denis Diderot ?

Si votre fée clochette vous disait Prague, Légèreté et K quel écrivain vous viendrait-il à l’esprit ? Milan kundera bien sûr ! Pourquoi vous parler de Kundera en ces jours de fête ? Parce que votre fée sait pertinemment qu’il va y avoir des retardataires en matière de cadeaux et qu’il n’y a rien de tel qu’un bon livre pour remonter le moral des troupes ! Oui je sais, mon « langage » paraît énigmatique mais vous allez tout comprendre en un claquement de doigts car cet article, c’est « l’infinie bonne humeur » incarnée !

La fête de l’insignifiance est cette dernière pierre posée sur l’œuvre qu’a construite Milan Kundera un peu comme… Jacques le Fataliste de Diderot…ces deux écrivains, que trois siècles séparent (bien que Kundera soit un homme du XXème siècle) avaient la même volonté et ce, dès le début de leurs carrières d’écrivain et de philosophe, celle d'écrire sur le « non-sérieux ». Pourquoi ? Notre siècle n’est, justement, qu’une course contre la médiocrité mais surtout contre cette énergie négative qui ne cesse de nous gangrener. Tiens tiens, cette description va aussi à merveille au XVIIIème siècle, un siècle où la France de Diderot a connu un événement historique majeur : la Révolution de 89. C’est pour cette raison, entre autres, qu’il fallait réinventer l’écriture, parler de joie et de jouissance, remédier à cet esprit un peu trop sérieux donc monotone qui s’est emparé des lettres. De Diderot, on passe à Kundera et vice versa puisque dans la littérature, l’espace/temps est aussi honni que banni.

La fête de l’insignifiance devient ainsi le Jacques du XXIème siècle quoique modernisé à la sauce d’un Kundera

Si dans L’Immortalité on retrouve Goethe et Hemingway dissertant côte à côte dans un esprit bon enfant euh…oui, Goethe est le père de Faust et oui, tout est permis en littérature, c’est pour cela qu’on ne cesse ou que les écrivains ne cessent de tirer la langue à la norme ! Bref, où en était votre fée, ah oui, Hemingway et Goethe dissertant, deux écrivains issus de deux siècles différents « ressuscités » pour les besoins de la littérature puis « jetés » dans le même livre, voilà les prémices du non-sérieux ou encore Jaromil, ce double de Rimbaud, dans La vie est ailleurs qui découvre les plaisirs de la chair, tel notre Prométhée, voleur de feu mais surtout, coureur de jupons à ses heures perdues ! Cela en deviendrait presque une « biographie fictionnelle », risible et anti-académique, au grand dam des iconophiles ! Or, La fête de l’insignifiance pousse le non-sérieux jusqu’à l’extrême en « narrant » l’histoire d’un Staline « rieur », taquin et blagueur au beau milieu d’un quiproquo autour du cancer ! Ceci n’est pas un roman…évidemment puisque Kundera, tel le fantôme de Diderot est tout, sauf un faiseur de roman(s) !

Digressions, répétitions délibérées puisque le commun des « lecteurs » découvre « (d)es mots que (l’auteur) a écrit dans le dernier paragraphe du chapitre précédent ». Coq-à-l’âne permis et prémédité, sensualité et érotisation du…nombril « ce petit trou rond situé au milieu du corps » ! Bref, tout est déconstruit et il est impossible de saisir ce texte tout comme… Jacques le fataliste ! La fête de l’insignifiance est ainsi un concentré de matière grise, de références, de babillages « intéressants », de paradoxes mais surtout de bonne humeur, une bonne humeur qui trouve sa « finitude » à la fin du livre. En effet, on ne peut pas s’empêcher de rire, (bien qu'on rie jaune) du début jusqu’à la fin de ce petit bijou littéraire.

Réalisation d’un fantasme ou prouesse littéraire ? Pourquoi doit-on choisir quand tout est là, magnifiquement ficelé dans un livre qui devient le théâtre de notre vie. La fête de l’insignifiance c’est quoi au juste ? Double tentative de définition parce que, d’un côté, on est face au meilleur livre du XXIème siècle, le livre qu’il faut lire ou peut-être offrir pour égayer plus d’un et d’un autre côté, cet anti-épilogue de l’œuvre de kundera est « inspiré(e) par notre époque qui est comique parce qu’elle a perdu tout sens de l’humour. Que peut-on encore dire ? Rien. Lisez ! » et qu’est-ce qu’on se délecte de cet ordre, une sorte d’invite au meilleur Kamasutra intellectuel qui soit : la lecture !

La Fête de l’insignifiance de Milan Kundera, paru aux Editions Gallimard., 142 pages, prix : 28dt, disponible à la librairie El Kitab

Jacques le Fataliste de Denis Diderot (si toutefois votre fée a réussi à vous mettre l’eau à la bouche !) est aussi disponible à la librairie El Kitab et il ne coûte que 10dt900 !


Fatma Souiri Gharbi