Écologie

Recyclage en Tunisie : quand les Barbéchas tunisiens réinventent l'économie circulaire

Des milliers de ramasseurs et ramasseuses informels, appelés barbéchas, œuvrent chaque jour pour extraire des déchets recyclables des rues, des poubelles ou des décharges. Leur activité, bien que peu visible, contribue à l’économie circulaire tunisienne. Pourtant, sans statut légal, sans protection sociale et souvent sans reconnaissance, ils restent en marge. Un éclairage sur ce que font les barbéchas, sur ce qu’ils subissent, et sur les initiatives qui pourraient donner plus de force à leur rôle.


Qui sont les barbéchas et quelle est leur importance ?

On estime qu’en Tunisie il existe environ 10 000 barbéchas selon l’Agence nationale de gestion des déchets (Anged). Ces ramasseurs informels se chargent de collecter plastique, carton, métal et autres déchets valorisables pour les revendre ou les livrer à des recycleurs. Grâce à leur travail, environ 200 000 tonnes de déchets ménagers sont valorisées chaque année, dont 70 000 tonnes de plastique.

Parmi ce groupe, les femmes sont nombreuses. Une étude conduite par l’Union nationale de la femme tunisienne (UNFT) dans le Grand Tunis indique qu’il y aurait environ 8 000 femmes barbéchas. Dans ce même échantillon, beaucoup ont plus de 40 ans, et très peu ont un niveau d’études supérieur. Pour une majorité, c’est le revenu principal.


Conditions de vie, difficultés et invisibilité

Le travail des barbéchas impose une rude discipline quotidienne : se lever à l’aube, parcourir des rues et des zones parfois dangereuses, trier des déchets, tous les jours. Beaucoup travaillent sans équipements de protection adéquats, pas ou peu de gants, de masques, voire d’eau potable sur les lieux de collecte.

La rémunération est très variable, liée au poids et à la qualité des matériaux collectés. Un kilo de bouteilles plastiques ne rapporte que quelques centaines de millimes, ce qui oblige à collecter beaucoup pour obtenir un montant viable. Ces fluctuations rendent la vie instable pour les barbéchas, surtout en l’absence de filet social ou de sécurité de l’emploi.

Socialement, les barbéchas sont souvent stigmatisés. Invisibles dans les politiques publiques, peu pris en compte dans les discours municipaux ou nationaux, ils restent marginalisés. Une étude du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) finit par affirmer que l’écologie tunisienne ignore parfois ceux qui rendent possible la collecte des déchets recyclables dans les villes.


Initiatives et réponses institutionnelles

Des projets pilotes et des efforts structurels ont commencé à émerger. À la Cité Ettadhamen, par exemple, l’ONG International Alert, en partenariat avec une association locale, a mis en place une unité de recyclage des déchets plastiques destinée à 60 barbéchas. Cette unité vise à leur garantir un salaire régulier, une couverture sociale, et une insertion dans l’économie locale.

Sur le plan réglementaire, l’État tunisien, via l’Anged, envisage d’intégrer les barbéchas dans le secteur formel. L’un des axes étudiés est la création d’entreprises communautaires, la révision des cahiers des charges pour la collecte, le tri, et la valorisation.

De plus, un plan d’action approuvé récemment prévoit une refonte de plusieurs textes juridiques liés au recyclage, un renforcement du système de contrôle dans les communes, et la simplification des démarches administratives pour les structures de valorisation.


Enjeux à relever pour aller plus loin

L’une des premières nécessités est celle de légiférer : reconnaître le métier de barbecha, définir un cadre légal qui protège leurs droits (santé, sécurité sociale, assurances). Sans ce socle, tout progrès reste fragile.

Ensuite, il faut développer les infrastructures de proximité : centres de collecte locaux, moyens de transport pour acheminer les matériaux collectés, espaces de tri accessibles. Ceci permettrait d’alléger la charge matérielle et de diminuer les distances parcourues, ce qui améliore revenus et conditions de travail.

La sensibilisation joue un rôle clé. Si les citoyen·ne·s comprenaient mieux l’importance du tri à la source, la qualité des déchets ramassés s’améliorerait (moins de mélange, moins de déchets dangereux), ce qui rendrait le travail des barbéchas plus efficace et moins risqué.

Enfin, en soutenant des formes collectives (coopératives, associations), on peut permettre aux barbéchas de mutualiser les moyens, de négocier des prix plus justes, et de disposer d’une voix dans les décisions locales liées aux déchets.

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