Un phénomène préoccupant

Partout en Tunisie, la présence d’animaux errants (chiens et chats) est devenue problématique. Les experts estiment le nombre de chiens de rue à plus d’un million, soit environ  1 chien pour 4 à 7 habitants.

Ce phénomène est dû à l’abandon massif des animaux et au manque de stérilisation. Beaucoup de Tunisiens adoptent un chien pour l’aspect « à la mode » sans mesurer ses besoins, et finissent par l’abandonner. Les chiens servent souvent de système d’alarme puis sont abandonnés lors des portées. Les chats, plus discrets, souffrent du manque de nourriture et de soins, malgré leur rôle utile pour contrôler les rongeurs.

Conséquences pour les humains et les animaux

Le principal risque sanitaire est la rage : cinq personnes sont mortes en 2021 et six autres en 2023 après des morsures de chiens errants. Les meutes inquiètent les habitants, et en milieu rural, elles peuvent s’attaquer au bétail.

Pour les animaux, la situation est dramatique : malnutrition, maladies, maltraitances, voire abattage en pleine rue. Après 40 ans de politique d’abattage, les chiens continuent de proliférer. Dans les villes, certains agonisent des heures après avoir été tirés dessus .

Réponses fragmentaires

Le gouvernement se concentre sur la vaccination antirabique (362 centres, coût ~6 millions de dinars/an). L’abattage reste toutefois fréquent : en juin 2024, environ 276 chiens ont été tués à Tunis pour prévenir la rage.

La législation a longtemps été faible : l'article 317 du Code pénal prévoit 15 jours de prison et 4,80 dinars d’amende pour mauvais traitement. En juillet 2024, un projet de loi historique a été déposé pour encadrer la protection animale et interdire l’abattage systématique.

Quelques municipalités (Ariana, La Marsa, La Goulette) ont lancé des centres de stérilisation/vaccination, mais dépendent largement de dons privés .

Associations et acteurs sur le terrain

Les associations jouent un rôle crucial :

PAT : refuge à Bouhanach, vaccins et stérilisations, milite pour le marquage électronique.

Ezzahra Pet’s Lovers : sensibilisation et dénonciation des politiques basées sur la peur.

SOS Animaux Tunisie et ALVIA : sauvetages, stérilisation de chats et éducation dans les écoles.

Vers des solutions durables

Experts et associations s’accordent : seule une approche globale et humaine peut résoudre le problème. Vaccination, castration et stérilisation préviennent les maladies et contrôlent la population.

Des conventions entre municipalités et vétérinaires offrent des soins gratuits, tandis que des campagnes de capture-vermifugation-stérilisation se développent. La responsabilisation des propriétaires via le marquage électronique est aussi envisagée.

Quant aux propriétaires d’animaux, des voix politiques suggèrent de les responsabiliser (par exemple via une législation imposant le marquage électronique) pour réduire le lâcher libre des chiens.

Au-delà des mesures institutionnelles, chacun peut agir à son échelle. Il est important de se rappeler que les animaux errants méritent considération, nourriture, soins et un environnement sûr. Même de petits gestes, nourrir régulièrement un animal, signaler un animal blessé, contribuer à des campagnes de stérilisation ou sensibiliser son entourage, ont un impact réel sur leur bien-être et sur la sécurité collective. Ces actions, rationnelles et responsables, renforcent la cohabitation harmonieuse entre humains et animaux et participent à construire une société plus respectueuse de toutes les formes de vie.

Conclusion

La lutte contre les animaux errants met en évidence des enjeux sociaux et éthiques. L’avenir dépendra de la mise en œuvre de la loi, de l’efficacité des campagnes de stérilisation/vaccination et de l’engagement citoyen. Ignorer ce problème « c’est tourner le dos à une part de notre humanité ».