Coup de cœur

Bader Dridi : Musicien authentique aux multiples talents

©Antonio Cuda

Toute création artistique nécessite une source d’inspiration et Bader Dridi a trouvé la sienne dans notre patrimoine musical qu’il a choisi de valoriser. Une rencontre inspirante qui fut un réel retour à nos racines.

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Parlez-moi de votre identité musicale ? Votre style ? Comment décrivez-vous votre musique ?

Je suis compositeur, chanteur et guitariste. Je m’inspire de la musique tunisienne, nord africaine comme le stambeli, le bedoui, le sahraoui, le rakrouki pour créer de la musique qui soit un retour aux sources, aux origines.

Notre pays a un héritage culturel et musical énorme malheureusement délaissé et longtemps mis de côté. Je travaille donc à la sauvegarde, la valorisation et la promotion de la musique populaire pour la préserver de l'oubli.

À travers mes textes, j’essaye de dresser un tableau de la société tunisienne, une société révoltée, en souffrance car je pense pertinemment que l’art et la culture sont les seuls remèdes possibles.

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Parlez-nous de votre parcours musical ? 

J’ai étudié au conservatoire à Tunis où j’ai obtenu une licence d’interprétation de musique occidentale (spécialité guitare), ensuite j’ai fait un master en musique et musicologie à l’université de la Calabre en Italie où j’ai entamé un doctorat en « esthétique de l’improvisation ».

L’Italie a été une expérience personnelle et professionnelle très enrichissante avec des concerts et rencontres qui ont profondément marqué ma musique.

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Pouvez-vous nous présenter votre projet « Aaroug » (Racines) ?

C’est un projet musical que j’ai débuté en décembre 2016 en collaboration avec Mohamed Khachnaoui, un ami et batteur extrêmement doué. Ce projet représente les différents styles du répertoire du « Tourath » tunisien.

Nous sommes huit musiciens sur scène (ce qui représente un énorme travail d’organisation) et nous jouons avec des instruments qu’on ne voit pas souvent comme le guembri, l’outar, la gasba, le mezoued sans oublier les percussions comme le bendir et les chkachik. Nous tentons d’exploiter les spécificités sonores et techniques de tous ces instruments délaissés pour montrer leur richesse au public, qui les redécouvrent ainsi à travers notre musique.

Quelles sont vos plus belles expériences musicales ? Avez-vous participé à des festivals ? 

Les JMC (Journées Musicales de Carthage) de cette année qui se sont déroulées du 8 au 15 Avril sont un beau souvenir pour moi car j’ai reçu le prix qui me tenait le plus à cœur, celui du meilleur concert ou œuvre musicale tunisienne.

Il y a aussi l’expérience du concert du 22 août au musée archéologique de Sousse. C’était un moment unique dans un sublime espace bien exploité par les organisateurs qui ont fait un très beau travail. On a aussi été exalté par l’émotion collective générée par un public extrêmement engagé et intéressé, venu pour écouter et apprécier la musique.

« Aaroug » s’est produit également en avril au Festival National des Musiciens Amateurs de Menzel Temime avec des scènes off qui ont offert la chance à de nouveaux talents de se produire et se faire connaître.

Ces expériences étaient marquantes car elles relatent le rôle important que doivent jouer les festivals dans la promotion du patrimoine artistique populaire et culturel local. Ces artistes qui ont participé ont offert une image authentique et belle de la Tunisie que le public était ravi de découvrir.

En tant qu’artiste indépendant, comme décrivez-vous le volet production/promotion/ vente de votre musique ? Trouvez-vous des difficultés à ce niveau ?

Honnêtement, de nombreux artistes en Tunisie ont l’impression d’être seul, délaissé et je ne suis pas une exception ! Il y a un manque de communication et de subvention qui fait que notre travail est une lutte continue pour sponsoriser et faire connaître notre musique.

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Quels artistes en général admirez-vous ? Quelles sont vos références en Tunisie et dans le monde arabe ?

J’admire beaucoup le travail de Cheb khaled et Karim Ziad qui est un batteur chanteur et compositeur algérien.

Pour mes références tunisiennes, je dirai Ismail Hattab qui imposa le bédoui en redonnant vie à la zokra (bombarde) en la mélangeant aux percussions de la Tabla et bien sûr Hedi Habbouba, le roi du mezoued.

La musique de Fela Kuti, créateur de l’afrobeat m’a aussi beaucoup inspiré. C’est une fusion des éléments afro-américains du funk, du jazz, de la musique d'Afrique occidentale, de la musique traditionnelle nigériane et des rythmes yorubas.

Ces styles de  musique complexes avec des racines dans le jazz, dans le mezoued, dans le blues et plein d'autres courants encore me laissent une empreinte au moment où je compose.

Quels sont vos futurs projets ? Y aura-t-il des concerts en Tunisie prochainement ?

Actuellement focalisé sur le projet « Aaroug » qui est encore à ses débuts et qu’on espère voir croître afin que notre musique arrive à toucher un large public. Nous sommes aussi en cours d’enregistrement de l’album.

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Pour finir, que pouvons-nous vous souhaiter pour la suite ? 

Faire connaitre et exporter  notre musique sur les scènes internationales et les festivals ethniques.

©Antonio Cuda

Hella NOURI