Zoom sur un événement

Retour sur la 11ème édition de Jazz à Carthage

Retour sur la  11ème édition de Jazz à Carthage


L’édition 2016 de Jazz à Carthage était attendue avec la plus grande impatience. En effet, le festival a acquis au cours des années (plus d’une dizaine d’éditions) une solide réputation. Cette année, il a réussi à outrepasser les obstacles du passé et à proposer une programmation de qualité dans un cadre agréable. Ce cadre, l’hôtel Carthage Thalasso Resort, est celui qui depuis toutes ces années permet au jazz d'envoûter les foules.

                                                                                                                                                                 @Programmation des artistes 2016

Le premier contact s’est fait par les invités à la conférence de presse. Ils se sont rendus à l’hôtel Africa (Centre ville) le 24 mars. De nombreux journalistes étaient invités, tous supports d’information confondus (radio, presse écrite, presse web). La stratégie efficace de communication s’est mise en place : une large médiatisation dans un cadre réputé pour accueillir les événements les plus prestigieux. Ce déploiement de moyens est compréhensible lorsque l'on sait qu'avait lieu en même temps le festival des Journées Musicales de Carthage. 

Le soir d’ouverture, les guichets affichaient complet : Selah Sue était en tête d’affiche. Les contrôles de sécurité à chaque niveau du lieu nous ont rassurés sur la qualité de l’organisation. 

Nous avons été transportés par la performance de Selah Sue. C’était ce que l'on nomme dans le jargon une véritable « bête de scène » qui a su emmener son public et l’émouvoir. Elle a marqué les esprits par son énergie, son talent et sa jeunesse. Elle semble être le genre d’artiste que l'on apprécie mille fois en concert live qu'en différé, à travers un écran ou un lecteur de musique quelconque. 

Lors de la deuxième soirée allaient se succéder Raul Midon et Terence Blanchard. J’étais heureuse de voir enfin en direct Raul Midon. C’est un artiste que j’admire depuis de nombreuses années. La groupie au fond de moi s’extasiait de voir à quelques mètres de distance sa silhouette caractéristique avec son béret, sa guitare et ses lunettes de soleil. En arrivant sur scène, il a salué le public en arabe, et il a ensuite fait courir ses doigts sur la guitare. Il a repris la prouesse qu'il avait faite au concert de Richard Bona : jouer en même temps de la guitare et du tambourin tout en chantant et en jouant de la trompette avec sa bouche. Artiste aux multiples talents, il a également joué une chanson en piano-voix. 

Ensuite, cela a été le tour de Terence Blanchard & The E-Collective de monter sur scène. Il avait une tenue mélangeant le noir, l'or et les motifs tissés. Le mélange extravagant entre les accessoires et les textures donnait un ensemble équilibré et original. Le concert comportait des moments où la musique emportait le spectateur, et d'autres plus avant-gardistes où l'on écoutait religieusement. L’ingénieur son et le matériel fourni donnaient de très bons résultats : c'est un son fin et juste dont le public a pu profiter. Il y avait une bonne entente musicale pendant les jams sessions/boeuf entre les musiciens - surtout des signes de complicité entre le batteur Kendrick Scott et Terence Blanchard

L’harmonie lors des impros est un signe de compétence et une preuve de complicité profonde. L’improvisation fait appel à l’inconscient et à la technique brute à la fois. La communication se fait au delà des mots, de la pratique. Elle est l’expression viscérale de deux imaginaires créatifs. 

Nous pouvons sentir l’harmonie lors d’un autre concert, celui de la soirée du surlendemain, durant l’impro entre Omar El Ouaer et Hedi Fahem. La musique était hypnotique, à écouter en silence. La surprise de la soirée était le passage surprise de Yasmine Azaiez au micro, accompagnée des deux musiciens. 

Le festival s’est terminé avec la performance de Melody Gardot. Nous retiendrons le numéro d’Irwin Hall, un saxophoniste qui a joué avec deux saxophones en même temps. La musicienne exprimait une grande affection pour le public tunisien. Elle a beaucoup interagi avec lui. Elle a également  posté sur Instagram de belles photos prises en Tunisie : Sidi Bou Saïd, promenade en chameau dans le désert, médina, ruines antiques. Dans la situation actuelle de crise économique et  touristique, la promotion de Melody Gardot du patrimoine tunisien à travers Instagram fait qu’elle encourage le pays à sa façon.

Les huit jours de festival ont représenté une bouffée d’air frais pour le public. La qualité de l’organisation, du programme, de la sécurité et des performances jouées placent la barre haut dans l’organisation de festivals tunisiens de musique. Jazz à Carthage a tenu sa promesse de festival de référence pour cette année.

 Sara Boussen